Après la lettre de menace de Sassou Nguesso : doit-on s’inquiéter pour le juge Serge Tournaire ?

 

Contenu de l’article

Le 26 mars 2025, Le Canard Enchaîné révélait qu’une lettre de menace avait été adressée au juge Serge Tournaire par Denis Sassou Nguesso, prétendu président du Congo-Brazzaville. L’autocrate, furieux de l’émission d’un mandat d’amener à l’encontre de son épouse, Antoinette Sassou Nguesso, dans l’affaire dite des BMA, semble avoir franchi un cap supplémentaire.

Contenu de l’article

À la tête du Congo depuis près d’un demi-siècle, ancien officier marxiste devenu maître d’un État mafieux, Sassou Nguesso incarne toutes les dérives d’un pouvoir autoritaire. Sa réputation de se débarrasser discrètement de ses opposants – souvent par empoisonnement – n’est plus à faire. Il est rancunier, implacable, et ne tolère aucun affront… Et un mandat judiciaire visant son épouse relève absolument, pour lui, d’une offense suprême.

Silence médiatique et déni officiel

Fait troublant : la presse française est restée étrangement muette, tant après la publication du mandat par Africa Intelligence (7 mars 2025) que suite à l’article du Canard Enchaîné. Pire, certains canaux officiels ont laissé entendre que cette fameuse lettre pourrait être un faux, balayant ainsi toute velléité d’indignation – comme ce fut le cas après l’attentat contre le DC10 d’UTA, la guerre civile de 1997-98 (et ses 400 000 morts oubliés, 10% de la population congolaise), ou encore l’affaire des Disparus du Beach.

Pendant que la France se mobilisait, ces derniers jours, pour ou contre une décision judiciaire nationale à l’encontre de Marine Le Pen, aucune voix médiatique et plus encore politique ne s’est élevée pour défendre un juge de la République menacé par le dictateur congolais. L’Agence France-Presse (AFP) n’a pas daigné relayer l’information du Canard Enchainé, ainsi que l’annonce préalable du mandat d’amener émis par le Juge Tournaire. Curieux service public qui pratique une censure systématique afin de protéger le plus vieux et féroce dictateur congolais.

Une agence de corruption au cœur de Paris

En 2020, un événement aurait pu provoquer un scandale retentissant : la découverte, dans un local situé 2 rue Frédéric Le Play (7e arrondissement de Paris), d’une valise contenant plus de 700 000 euros en liquide (d’après nos informations). Ce bureau, tenu par le service de communication de Claudia Sassou Nguesso (fille du président), servait de véritable « agence » de distribution de pots-de-vin à destination de décideurs français. Journalistes, élus, influenceurs : chacun y trouvait de quoi satisfaire caprices ou train de vie.

Cette « antenne » parisienne de la corruption comptait quelques collaborateurs rappelés pour leur protection à Brazzaville et l’un deux a été promu à l’ambassade du Congo au Canada.

À Brazzaville, un proverbe populaire dit :« On ne parle pas la bouche pleine ». Un adage qui explique peut-être pourquoi tant de médias français, liés à des intérêts dans la région (Bolloré, Bouygues, Dassault, Niel, Pigasse (Matthieu)…, choisissent de détourner les yeux.

L’art de l’élimination

Les ennemis de Sassou Nguesso disparaissent. Autrefois, les règlements de comptes étaient sanglants. Aujourd’hui, les assassinats sont plus discrets, maquillés en crises cardiaques ou AVC. Des substances comme le succinylcholine ou certains digitaliques permettent d’éliminer sans laisser de traces. Ses accointances avec d’autres régimes autoritaires du « Sud global » facilitent l’accès à ces poisons.

Il a même pu, grâce à la bienveillance française post-guerre civile, faire entrer dans l’hexagone des centaines d’ex-Cobras, ses anciens miliciens. Certains pourraient être encore actifs, ou en sommeil, prêts à agir.

En janvier dernier, Ghys Fortuné Bemba Dombé, un journaliste congolais exilé en France, a survécu à une attaque au couteau dans le RER à Corbeil-Essonnes. Geste isolé ou tentative d’assassinat politique ? L’enquête française semble bien timide…

Une justice en danger ?

Le juge Tournaire est soutenu par de nombreux Congolais qui espèrent que justice sera rendue. Mais face à un homme aussi dangereux que Denis Sassou Nguesso, la prudence reste de mise.

Comme le rappelle tristement l’histoire : « La rancune de Sassou Nguesso ne laisse aucune place à l’oubli. Ni au pardon. »

Contenu de l’article
Contenu de l’article

Hector CAPTAGON

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *