Congo : le moment de vérité économique d’un État exsangue à deux mois de l’arrêt

Ghys Fortuné DOMBE BEMBA

Les jours passent et se ressemblent, de plus en plus noirs. La situation du Congo n’aura jamais été aussi désespérée. La paie des salaires des fonctionnaires du mois d’octobre et autres  relèvera d’un miracle à l’image des pains et du poisson multipliés par Jésus comme l’annonçait, notre prophétie auto réalisatrice ! Le cancer est trop profond pour que le Congo en réchappe sans changement social violent. Ce qui est arrivé récemment à Madagascar a beaucoup de probabilités d’arriver au Congo malgré les manœuvres de Serges Oboa. Le compte à rebours est lancé

La situation financière  du Congo, à la fin de l’année 2025, atteindra un seuil de non-retour comme au décollage d’un avion lorsqu’il est lancé à pleine vitesse. L’annonce discrète d’un énième rééchelonnement de près de 400 milliards de francs cfa de dette publique ne relève plus d’un simple ajustement de trésorerie. C’est le signe d’un épuisement structurel de l’État. Ce réaménagement, négocié dans l’urgence par le ministre Christian Yoka, auprès de BGFIBank, Afriland First Bank, avec le concours des « bébés noirs » de la finance congolaise « LCB Capital » et « L’Archer », marque le cinquième rééchelonnement en moins de six ans, après ceux de 2019, 2020, 2022 et 2024. Une véritable cavalerie. Loin d’un redressement, cette manœuvre traduit une stratégie de survie budgétaire, où l’État ne rembourse plus. On repousse sans arrêt, comme des zombies, le regard vide et les pensées éteintes. Ce système de cavalerie financière ne se maintient plus que par la docilité et la cupidité d’un système bancaire régional surliquide, prisonnier des injonctions politiques de la BEAC et des ministères des Finances de la CEMAC, soucieux de préserver l’apparence d’un marché monétaire “fonctionnel”.  Mais la réalité est là avec ses chiffres. Anatole Collinet Makosso (ACM) peut le confirmer s’il est encore évangéliste, la dette publique (avouée) atteint 8 000 milliards de fcfa, soit 92 % du PIB, bien au-delà du seuil communautaire de 70%. Mais c’est un secret de polichinelle : on a dépassé ce seuil dans la réalité. Le service de la dette prévu entre août et décembre 2025 s’élève à 782 milliards de fcfa, dont un pic de 279 milliards en octobre. Où trouver 782 milliards comme les famaux Mozarts de la finance congolaise Armel Dongou Zidane et ceux qui lui ont succédé se sont amusés pendant 15 ans ??? Les recettes fiscales sont à l’arrêt, plombées par l’égoïsme des gouvernants, la fraude massive et colossale sur la TVA, l’IRCM et les droits de douane via les exonérations fictives… Le Congo vit dans une économie d’illusion comptable, où les rééchelonnements successifs entretiennent la fiction d’une solvabilité souveraine. Structuré par Calixte Nganongo, porté au pinacle par Ludovic Ngatsé, le refinancement permanent par Bons et Obligations Assimilables du Trésor (BTA/OTA) ne masque plus la faillite. Sur les émissions d’août et septembre 2025, les marchés ont tranché : BTA 52 semaines (10 milliards proposés), taux de couverture 1,53 %, aucun titre servi ; BTA 13 semaines (30 milliards proposés), taux de couverture 47,26 %, montant servi 14,177 milliards seulement : les investisseurs ont déserté le marché congolais. Ils ont compris ce que Brazzaville refuse de dire, la probabilité de défaut est devenue systémique et imparable ! La notation souveraine, actuellement à CCC, devrait être abaissée à CC voire C, équivalant à une quasi-faillite technique. Mais même dans ces conditions, Christian Yoka continue à faire appel aux truands qui ont conduit l’appareil d’État à sa faillite comme, l’Archer, Corridor Assets Management, LCB Capital, BGFIBank… C’est incroyable mais tristement vrai !

Un État en autogestion financière : la faillite d’une gouvernance sans cap

Le rééchelonnement permanent de la dette n’est pas une solution. Christian Yoka, en présentant cette opération comme un “succès de discrétion et de diplomatie bancaire”, camoufle mal la réalité. Le Congo est en cessation de paiement ouverte et connue. Le choix d’une “restructuration silencieuse use”, sans transparence ni débat public, rappelle les dérives de 2016–2017, lorsque le gouvernement dissimulait sa dette commerciale vis-à-vis de Glencore, Trafigura et Commodities Finance Ltd. La gestion actuelle reproduit les mêmes erreurs : absence de plan de soutenabilité macroéconomique. Zero audit public actualisé de la dette n’a été publié depuis le rapport FMI de 2022. Les montants rééchelonnés, les échéances, les taux effectifs et les clauses de refinancement sont tenus secrets. Fétichisation du court terme. L’État ne raisonne plus

en politique budgétaire, mais en “solde de trésorerie hebdomadaire”. Le ministère des Finances agit en gestionnaire de faillite, non en stratège économique.

Captation politique du Trésor public

Les arbitrages financiers obéissent désormais au calendrier électoral. Priorité aux salaires et pensions qui sont payés prioritairement à Brazzaville et Pointe-Noire ainsi qu’à au magot de la machine à répression ( la DGSP ) à l’approche de l’élection présidentielle de mars 2026. Dans un tel contexte, aucune politique de croissance inclusive n’est possible. Les infrastructures sont à l’abandon, la dette intérieure explose, et le financement externe s’effondre. Les projets routiers, hospitaliers et scolaires sont suspendus depuis juillet faute de crédits. Le budget d’investissement 2025, initialement prévu à 480 milliards de fcfa, n’a été exécuté qu’à 23% à fin septembre. L’échec de Christian Yoka relève, en plus de son incapacité technique, d’un défaut total de courage politique : celui de rompre avec la culture de rente, de clientélisme et de dissimulation héritée du système Ondongo-Bouya et pérénnisé par Calixte Nganongo et Ludovic Ngatsé. Le singleton Jean-baptiste Ondaye,  ne pouvait pas tenir là où Andely malgré sa  poigne et ses capacités est tombé face à la mafia dirigée par ACM qui s’est liguée contre lui!  Sous prétexte de “préserver la stabilité sociale”, le régime maintient une administration sous perfusion, un secteur privé marginalisé, et une économie sans respiration. L’impasse actuelle est totale. Les salaires publics représentent 52% des

dépenses courantes. Les intérêts de la dette absorbent 35 % des recettes budgétaires. Les transferts sociaux, eux, sont inférieurs à 3% du budget national. C’est le schéma typique d’un État prédateur. La dépense politique prime sur la dépense productive. Le Congo vit dans un capitalisme d’appareil sauvage et cruel, où la dépense publique alimente les fidélités et les campagnes, non le développement. La conséquence directe est une asphyxie sociale dont le phénomène des « bébés noirs » et sa résolution actuelle sont les ferments d’une confrontation imminente. L’explosion du chômage urbain, l’inflation alimentaire à deux chiffres, et la contraction du pouvoir d’achat des fonctionnaires va finir d’abattre les digues de la peur. ( A suivre )

Ghys Fortuné DOMBE BEMBA

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